Lettre ouverte du CODE à M. Paul Barthélemy Biya bi Mvondo
"Monsieur, ne vous trompez pas d’avenir"
Monsieur
Paul Barthélémy Biya,
Deux
semaines à peine après la « Fête de la jeunesse » la jeunesse
camerounaise et le peuple camerounais vous ont exprimé ce qu’ils pensaient
sincèrement, du fond de leur cœur, de votre gestion et de votre projet de
modifier la constitution pour vous maintenir au pouvoir.
Au lieu de les écouter, vous avez infantilisé la jeunesse en
la présentant comme « manipulée » par des « apprentis
sorciers » que vous avez ensuite essayé de fabriquer en vain.
Les
jeunes camerounais vous ont exprimé courageusement et sans hypocrisie, de leur
propre cœur et de leur propre bouche, leurs sentiments envers votre politique
et ses conséquences quotidiennes. Vous les avez réprimés, tués, emprisonnés et
séquestrés. Si le sang a une valeur symbolique ou métaphysique, ce sang crie
toujours et aura son effet sans aucun doute, même si pour ceux qui l’ont versé,
il renforce momentanément leur pouvoir.
Monsieur
Biya,
Nous
ne doutons pas que le pouvoir enchaîne, au point qu’on ne puisse pas
s’envisager hors de ce pouvoir. Mais comme tous les autres chefs d’Etat anciens
et présents, vous n’êtes qu’un homme, un homme que l’avenir peut rattraper avec
cruauté ou avec bonheur, selon le propre choix de cet homme. Ne vous trompez
pas d’avenir, car vous n’avez le choix qu’entre 4 scénari possibles :
Vous
pouvez vous projeter comme Monsieur Idriss Deby, votre voisin, qui échappe in
extremis à
des coups d’Etat successifs grâce à la France à qui il est alors chaque fois
plus redevable. Mais à l'instar de ses prédécesseurs, il n'en réchappera pas ad
vitam æternam, c’est une certitude.
Peut-être
préférez-vous une fin à la Gnassingbé Eyadema, surpris par la mort alors qu’il
était encore au pouvoir et - dit-on - dans l'avion qui l'emmenait en France
pour quérir des soins que le système de santé de son pays ne pouvait prodiguer
à ses citoyens. Peut-être est-ce cela que vous souhaitez, et alors tant mieux
pour vous, du moins sur cette terre.
Cependant,
nous vous présentons aussi le destin de Mobutu Sese Seko, cet homme qui croyait
tenir le Zaïre certainement mieux que vous ne tenez le Cameroun, qui n’avait
jamais envisagé son avenir hors du pouvoir. Parce qu’il n’a pas su percevoir à
temps le sens de l’Histoire, il s’est retrouvé fuyant comme un vulgaire bandit
vers l’aéroport de Kinshasa pour échapper à un avenir cruel.
Et
enfin, vous pouvez vous inspirer de MM. Mandela, Diouf, Kérékou, Konaré,
prochainement Mbeki, qui vivent certainement tout aussi heureux hors du pouvoir
que quand ils y étaient.
L’Histoire
n’est jamais une question du moment, c’est une question de temps. Et de toutes
façons, ce temps vous est compté. Alors faites le bon choix, car les occasions
de se retourner se feront rares. Regardez en arrière, et souvenez-vous de votre
première prestation de serment : plus de 25 années déjà. Et ces années,
patiemment, heure par heure, jour par jour, mois par mois, ont passé.
Ne
vous trompez pas en croyant que demain est lointain, et que l’essentiel, c’est
d’y rester aujourd’hui. Demain est encore plus proche que le 06 novembre 1982.
Vous
savez bien que le système de santé est en faillite, puisque régulièrement, sans
aucun scrupule, vous le fuyez au profit d'hôpitaux européens pour vous y faire
soigner.
Vous
savez bien que la corruption a gangrené votre régime et vous nous en donnez des
aveux chaque jour par les arrestations de quelques rares individus dans la
masse des corrompus.
Bref,
vous savez bien que vous avez échoué dans l’objectif primordial d’un chef
d’Etat, qui est d’assurer à son peuple le développement et l’élévation de son
niveau de vie.
Votre
présence à la tête de notre pays est la plus grande catastrophe naturelle qui
soit arrivée à celui-ci ! C’est dur à entendre, mais seule la vérité
affranchit pour qui veut être libre.
Affranchissez
vous, M. Biya et regardez la réalité en face : laissez le pouvoir en 2011,
ou avant si vous voulez. Mais ne tentez pas d’y rester.
Cette
réalité que vous niez et que vous ne voulez regarder qu'au prisme de votre
grande ambition de mourir au pouvoir, au prisme des renseignements erronés que
vous recevez de vos collaborateurs, cette réalité est plus grave et plus
explosive que ce que vous en avez vu il y a quelques semaines. Ne vous y
trompez pas.
Prenez
donc cette lettre ouverte comme l’appel d’un peuple à son dirigeant pour lui
dire :
« Nous
ne voulons pas t’affronter par la force. Ne nous y pousse pas. Parce que tu vas
perdre même si le sang doit couler ».
Sans
douter que nous sommes en phase avec tous les Camerounais progressistes ou
démocrates, de toutes les organisations de la société civile camerounaise et
des partis politiques camerounais y compris le vôtre (où tout le monde ne
souhaite pas cette révision constitutionnelle),
Et
par amour pour notre pays, pour la paix dans notre pays, pour le progrès dans
notre pays,
Renoncez
à votre révision constitutionnelle tant qu’il est encore temps !
Ne
nous poussez pas sans cesse à bout, vous serez surpris de notre
détermination ;
Ne
vous croyez pas invincible, vous pourrez être cruellement désillusionné.
Ne vous trompez pas d’avenir.
Pour le CODE ,
- CNR/MUN (Conseil National de la Résistance – Mouvement Um
Nyobiste) M. G. TENE SOP
- UPC (Union des Populations du
Cameroun) : Dr Moïse
ESSOH, (secrétaire exécutif du CODE)
- CFM (Cercle Félix Moumié) : Dr Patrice NDJOUMI
- CFD (Campaign For Democracy) : Luc Magloire ZINTCHEM