COMPTE RENDU DE LA RENCONTRE-DEBAT DU CODE LE SAMEDI 13 DECEMBRE 2008 A PARIS
Pour introduire ce débat, trois des cinq intervenants initialement prévus ont pris la parole, à savoir MM. Samuel NJUFOM, membre du Bureau du Comité Directeur de l’Union des Populations du Cameroun, Guy Simon NGAKAM, membre du Front pour l’Evolution et la République, et Patrice NDJOUMI président du Cercle Félix MOUMIE. M. Hugo MOUDIKI du Conseil National de la Résistance (CNR) membre du CODE, et le prof Kapet de BANA s’étant tous les deux excusés pour cause de déplacement.
Pour l’essentiel l’intervention du Dr. Samuel NJUFOM a d’abord posé comme postulat qu’actuellement, aucune force politique d’opposition ne peut à elle seule, apporter le changement politique au Cameroun. Des convergences progressistes sont dès lors indispensables au triomphe d’une véritable démocratie dans notre pays. Pour lui, il est donc nécessaire qu’un Forum démocratique soit animé, au sein duquel toutes les forces de changement politiques se donnent comme mission, au moins, de forcer la mise en place de conditions indispensables pour de véritables élections au Cameroun. Le Dr. NJUFOM a précisé quelles sont ces conditions, en soulignant que celles-ci pouvaient constituer une plate-forme d’autant plus consensuelle que ces propositions ont fini par rallier à ce jour non seulement la majorité des partis politiques d’opposition, mais même une bonne partie de l’épiscopat camerounais :
1. une Commission Electorale Nationale Indépendante ;
2. un scrutin à deux tours ;
3. la possibilité de candidatures indépendantes des partis politiques ;
4. l’abaissement de l’âge de la majorité électorale à 18 ans ;
5. l’inscription sur les listes électorales des 8 à 10 millions d’électeurs (au moins) que doit compter aujourd’hui la population du Cameroun ;
6. la reconnaissance du droit de vote pour les Camerounais de la Diaspora en âge de voter et la mise à disposition des moyens matériels et humains pour l’exercice effectif de ce droit.
Pour sa part, le membre du Front pour l’Evolution et la République, M. Guy Simon NGAKAM, membre fondateur du CODE actuellement hors de cette organisation mais qui lui est toujours proche, est revenu sur la notion d’élection comme mode de désignation des dirigeants d’un Etat. Il a démontré que l’élection n’est qu’un des modes de délégation et de partage du pouvoir. S’agissant de la place de la diaspora dans un combat pour des élections véritables au Cameroun, il a invité la diaspora progressiste à ne pas toujours boycotter le processus électoral, non pour légitimer les mascarades du régime, mais pour former la population à savoir résister aux magouilles électorales.
Enfin, le Dr. Patrice NDJOUMI, président du Cercle Félix MOUMIE, a fait une analyse comparative des différents processus qui ont permis une alternance électorale en Afrique, et a ainsi dégagé deux grands types de mécanismes. D’une part le mécanisme de l’homme providentiel, c'est-à-dire d’une personnalité qui, par son attitude face au pouvoir, a ouvert la voie à un processus de type démocratique dans son pays. C’est le cas d’Amadou TOUMANI TOURE, d’Olesegun OBASANJO, encore de Matthieu KEREKOU, généralement des militaires qui, après un passage au pouvoir, ont ouvert la voie à un processus démocratique, avant parfois d’y revenir eux-mêmes. Et d’autre part le mécanisme du coureur de fond, c'est-à-dire d’une personnalité qui construit dans le temps, généralement pas moins de deux décennies, son image et sa stratégie de prise de pouvoir, notamment par le maillage du territoire par une organisation politique bien implantée. Ce type d’homme, selon le Dr NDJOUMI, arrive généralement à fidéliser une masse critique au sein du peuple, masse critique qui lui permet, le cas échéant, de résister à toute fraude électorale. C’est le cas d’Abdoulaye WADE ou de Laurent GBAGBO. Appliqué au Cameroun, il a conclu que pour l’instant, il n’y avait pas de coureur de fond, et encore moins d’homme providentiel. Une solution originale serait donc à trouver, en tenant compte des éléments de réussite observés dans les exemples analysés.
Pour terminer, le secrétaire exécutif du CODE, le Dr. Moïse ESSOH, a officiellement présenté les « Actes du Forum International de la Diaspora Camerounaise », Forum qui s’était déroulé à l’initiative du CODE les 14 et 15 mai 2005 et publiés donc officiellement ce samedi 13 décembre 2008.
Il a également dressé un bilan des cinq années d’existence du CODE, notamment les nombreuses manifestations, rencontres diplomatiques et les nombreuses interpellations qui ont mené, par exemple, à pousser l’Union Européenne à se désolidariser des mascarades électorales en s’abstenant d’y envoyer des observateurs. Il a regretté les lignes de fracture stratégique, de principe, et d’honnêteté nées de l’adhésion de certains nouveaux membres qui avaient rejoint le CODE suite au succès du Forum organisé en mai 2005. Dans le bilan du CODE, le Dr. ESSOH a insisté sur le soutien apporté par le CODE à toute organisation ou activité de résistance contre le régime RDPC-Biya, y compris comme ce fut le cas en mars-avril 2008, le soutien logistique et personnel accordé au groupe dissident du CODE, pour dénoncer les massacres des enfants par le régime et le tripatouillage de la constitution.
Tout en reconnaissant que la stratégie de discrétion médiatique du CODE a laissé le champ libre à la frénésie médiatique de la part du groupe dissident, le secrétaire exécutif n’a pas regretté que le CODE ne se soit pas lancé, lui aussi, dans une surenchère médiatique. Cependant, il a indiqué en substance que « La parenthèse de rigolade est terminée », et que « Les choses sérieuses vont désormais reprendre » pour bouter définitivement hors du pouvoir le régime néo-colonial en place depuis 1960.
Il a par ailleurs réaffirmé la position et la stratégie du CODE pour un changement effectif démocratique et progressiste au Cameroun. En effet, le secrétaire exécutif du CODE, le Dr. Moïse ESSOH, a tenu à être très clair :
Le CODE n’exclut aucune solution pouvant mener à la libération effective du peuple camerounais et à l’avènement d’une démocratie progressiste au Cameroun. Il a insisté, répétant « Aucune solution n’est exclue ». D’ailleurs, tout patriote doit toujours être prêt à mourir pour son pays, que ce soit par la torture dans une prison politique ou par balle sur un front quelconque.
Cependant, de manière toute aussi claire, le Dr Moïse ESSOH a martelé que le CODE privilégie et lutte actuellement pour un mode de changement politique, de préférence par la voie démocratique et impliquant la majorité du peuple camerounais, car on ne peut pas libérer le Cameroun sans les Camerounais.
Etant donné que les conditions politiques imposées par le régime dictatorial Biya ne permettent pas de vraies élections, la question posée par le CODE à l’assistance ce samedi 13 décembre 2008, à savoir « Comment contraindre le régime RDPC-Biya à de vraies élections ? », participe de cette stratégie.
La question étant ouverte, c'est-à-dire avec toute possibilité de réponse, s’en est suivi une discussion nourrie, au cours de laquelle les participants et notamment les conférenciers, par un jeu de questions réponses et suggestions, ont pu enrichir les propositions concrètes formulées par le CODE, et qui font l’objet d’une résolution interne séparée du présent compte rendu.
Ce que l’on peut toutefois indiquer c’est que les participants, progressistes pour leur très grande majorité, ont insisté sur la nécessité d’être présent sur le terrain auprès des populations et de les politiser suffisamment pour qu’elles soient aptes à défendre leur participation et leur bulletin de vote par tous les moyens. Ils ont également admis la nécessité pour toutes les forces politiques et sociales démocratiques de se réunir au sein d’une plate-forme ou d’un Forum d’échange et d’action pour imposer au régime RDPC-Biya des élections véritablement démocratiques. De même, les participants ont appelé le CODE à mobiliser les Camerounais autour de projets concrets tels que l’inscription simultanée sur les listes électorales, de plusieurs électeurs (centaines ou milliers) à la fois, avec réclamation de la remise immédiate des cartes d’électeurs. Ce type de mouvement de masse et de démonstration de force doit être encouragé voire organisé avec le soutien matériel, juridique et politique de la diaspora patriotique, et notamment du CODE. D’autres propositions plus concrètes formulées par le CODE ont recueilli le soutien d’une grande majorité des participants, et seront mises en œuvre par le CODE, en association avec les forces politiques progressistes de l’intérieur et de la diaspora.
A 20H00 exactement, comme convenu et après un débat totalement démocratique au cours duquel même les adversaires du CODE ont pu prendre librement la parole, la rencontre a pris fin sur les applaudissements de toute l’assistance, heureuse d’avoir mené un débat démocratique comme il y en a peu souvent au sein de la diaspora, et comme le CODE a pédagogiquement souhaité montrer l’exemple.
Compte rendu de Maxime SANDJO,
Bobigny, 13 décembre 2008.